"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

vendredi 8 décembre 2017

Tatiana Vladimirovna Torstensen: Saint Sébastien de Karaganda (3)


5.
En 1952, après des années de démarches, l’ouverture d’une maison de prière fut autorisée. On put y célébrer les baptêmes, les mariages, les enterrements, y recevoir les confessions, y réciter des prières, mais pas célébrer la Liturgie, donc pas communier. Mais une moitié du chemin était faite. Batiouchka continuait son œuvre et avait besoin de locaux.

Une femme très croyante, originaire de Mordovie, lui céda sa maison avec une grande cour. Une autre famille lui céda, non loin de là une grande maison, et vint habiter dans une plus petite, tout à côté.

La maison de prière fut aménagée. On supprima les cloisons qui pouvaient l’être et mère Agnès peignit de grandes et belles icônes pour l’iconostase.
Chaque jour, le père Sébastien baptisait beaucoup d’enfants et d’adolescents et célébrait encore beaucoup d’autres offices. Puis, après une journée chargée, après avoir dit ses prières dans sa cellule, chaque nuit, à trois heures du matin, le père Sébastien partait à pied dans les rues sombres (il n’y avait que très peu de lampadaires) célébrer la Liturgie dans une autre maison.

Mais les jours de fêtes, Batiouchka commençait par les vigiles à une heure du matin, suivies immédiatement de la Liturgie. Les fenêtres étaient soigneusement occultées, pour ne pas laisser filtrer de lumière au dehors.
À la fin de la Liturgie, le père Sébastien distribuait à chacun un petit cadeau : un petit pain, une pomme ou un paquet de biscuits. Il voulait ainsi consoler, soulager, aider ses fidèles. La Liturgie s’achevait avant l’aube et chacun retournait chez soi, seul ou à deux, mais jamais par groupe. Il en fut ainsi pendant trois ans.

Les démarches pour obtenir l’ouverture d’une véritable église se poursuivaient. Après maints voyages à Moscou, Alexandre Pavlovitch Krivonossov, un savant agronome très dévoué à Batiouchka, revint avec l’autorisation d’ouvrir une église à Mikhaïlovka.

Les travaux de transformation allèrent bon train : il fallait surélever le toit, et l’on y plaça une coupole bleue en forme de bulbe comme dans les anciens skites nichés dans la forêt.

En 1955, l’église fut consacrée en l’honneur de la Nativité de la Mère de Dieu. Dans la cour on construisit une maison paroissiale et plus tard un baptistère.
La mère supérieure Anastasia veillait sur tout. Elle gérait le réfectoire, la cuisine, la nourriture. Parfois elle aidait elle-même à préparer les repas qu’elle répartissait ensuite.

Elle portait toujours une longue jupe et se coiffait d’un foulard blanc. Elle avait un caractère d’ange, mais elle s’efforçait de le cacher sous une apparente sévérité. Mais seuls ceux qui ne la connaissaient pas la craignaient ! En vérité, tous l’aimaient et la respectaient beaucoup.

Elle avait reçu le don de clairvoyance. Elle prévoyait beaucoup d’événements, mais ne les révélait jamais clairement : elle laissait toujours entendre ou deviner. En voici un exemple :
Par une belle journée ensoleillée, les moniales Tatiana et Irène repiquaient des plants de tomates et s’apprêtaient à déjeuner lorsqu’elles virent par la fenêtre mère Anastasia se précipiter vers le potager pour déterrer les plants de tomates et les replanter dans un cageot qu’elle déposa sur le perron en disant : « C’est ici que les tomates doivent pousser ! » Les deux moniales ne comprenaient pas pourquoi, mais elles se taisaient. Après quoi mère Anastasia repartit aussi rapidement qu’elle était venue.

Le soir, un vent très violent se leva, le ciel se couvrit de gros nuages noirs. Une pluie torrentielle s’abattit, avec de gros grêlons, réduisant la terre du potager en bouillie. Les deux moniales furent très étonnées mais n’en dirent mot à mère Anastasia qui n’aimait pas dévoiler son don de clairvoyance et qui se détournait en fronçant les sourcils lorsqu’on y faisait allusion.

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